Lolita, peux-tu te présenter et présenter ton parcours en quelques mots ?
Je m'appelle Lolita Charlet. Je viens d’avoir 27 ans, et je suis originaire de Lille. J'ai toujours vécu ici. Ma passion pour la photographie a débuté vers 2017 lorsque j'ai acheté mon premier appareil photo. À l'époque, je réalisais des petits shootings très amateurs que je partageais sur Instagram. J'ai été agréablement surprise de la réaction positive que cela a suscitée.
En 2019, alors que j'étais en école de communication, j'ai décidé de concrétiser mon amour pour la photographie en lançant ma propre entreprise. Jongler entre les cours, mon entreprise et une alternance n'a pas été facile, mais je tenais bon. Puis, le Covid est arrivé, et tout a changé. Les cours en visio, l'arrêt temporaire de mes activités photographiques... C'était un moment difficile.
Pourtant, après le premier confinement, j'ai découvert un engouement soudain pour ma photographie. Tout le monde voulait immortaliser des moments particuliers. Mon entreprise a connu un essor, mais jongler avec mes responsabilités était un véritable défi. Malgré tout, j'ai pris la décision de valider ma licence et de me consacrer entièrement à la photographie pendant un an.
Cette année a été intense, surtout avec les confinements à répétition, mais j'ai persévéré. Il y a trois ans, j'ai ouvert mon propre studio à Lille. C'est une étape importante dans ma carrière, et je suis reconnaissante pour tout le soutien que j'ai reçu jusqu'à présent. Mon entreprise se développe, et j'ai hâte de voir ce que l'avenir me réserve.
Est-ce que tous tes shootings sont réalisés sur des fonds ou des décors au sein de ton studio ?
En hiver, la plupart de mes shootings se déroulent en studio. J'utilise souvent des fonds papier de différentes couleurs, mais ce que j'aime particulièrement, c'est créer des décors uniques. Je suis constamment à la recherche de pièces originales, que ce soit des rideaux, des fonds qui ressemblent à du papier peint vintage, ou même des tapis des années 70 pour recréer l'ambiance parfaite. J'ajoute à cela une sélection de meubles dans le même style pour compléter le décor. En résumé, tout ce qui est shooting en intérieur se passe généralement ici dans mon studio.
En ce qui concerne le style de mes décors, je suis passionnée par le vintage. Je ne m'arrête pas à une décennie précise, mais en ce moment, je suis beaucoup inspirée par les années 60 et 70, voire un peu des années 80. Au début de ma carrière, j'explorais davantage les années 40 et 50, mais je suis constamment en évolution. Mon péché mignon actuel, ce sont les années 70. J'adore chiner des pièces de mobilier et des éléments de stylisme de cette époque.
C'est un choix qui se révèle être très actuel, car le vintage est de retour en force dans la mode et la décoration. Trouver le bon équilibre entre éléments modernes et rétro est vraiment amusant, et cela correspond parfaitement à ma passion pour le vintage. C'est un univers qui m'inspire énormément et qui me permet de laisser libre cours à ma créativité. En fin de compte, c'était comme si c'était fait pour moi, un choix qui s'est révélé être le parfait reflet de ma personnalité et de mes aspirations artistiques.
Quelles sont tes sources d'inspiration ?
Mes sources d'inspiration sont très variées et puisent dans tout ce qui m'entoure. Parfois, je trouve l'inspiration en chinant dans une braderie, que ce soit par un vêtement ou un objet qui peuvent par la suite me donner des idées pour un shooting. Il peut s'agir aussi bien de mobilier vintage que d'un simple accessoire. D'autres fois, c'est lors de mes balades, en découvrant des lieux qui me semblent propices à la création de belles images.
Je puise également mon inspiration dans des sources plus immatérielles, comme les séries, les clips musicaux, ou même en explorant des plateformes comme Pinterest et Instagram. L'important pour moi, c'est de rester ouverte à toutes les influences et de laisser mon imagination vagabonder. En fin de compte, c'est un processus organique où tout ce que je vois et vis au quotidien nourrit mon univers créatif et me guide dans la réalisation de décors et de stylismes uniques pour mes shootings.
Pourquoi avoir choisi la photographie style vintage ?
Je ne sais pas vraiment pourquoi j'aime tant le style vintage, mais je pense que ça vient de mon grand-père. Chez lui, c'est comme un musée rempli de vieux objets qu'il aime restaurer. Je passe souvent du temps là-bas pour prendre des photos, car j'adore l'ambiance. Depuis que je suis petite, mon grand-père me montre ses trésors et me raconte leurs histoires. Ça m'a toujours intéressée, même si je ne sais pas exactement pourquoi. Je crois que ça a toujours fait partie de moi.
Quand j'étais enfant, je regardais des vieux films avec ma famille, comme 'La Boum'. Ça m'a toujours fascinée et ça a nourri mes rêves. C'est peut-être ça qui a allumé cette passion en moi. J’aime le vintage parce que ça me rappelle les histoires de ma famille et les moments passés avec eux. Ça me fait du bien, et ça me rend heureuse.
Est-ce qu'il y a des codes, des règles à respecter quand on pratique ce style de photographie ?
Je ne suis pas sûre s'il y a vraiment des règles à suivre. Personnellement, je déteste me sentir contrainte par des règles. Je préfère suivre mon instinct. Cependant, il est important de coordonner son mobilier. Il ne serait pas cohérent, par exemple, de mélanger un décor des années 60 avec des objets des années 2000. Même si en théorie, on peut faire ce qu'on veut, il est essentiel de veiller à la cohérence de l'époque représentée. On peut bien sûr jouer avec les idées, comme imaginer quelqu'un bloqué dans les années 70 avec des objets modernes, mais il faut quand même rester attentif à la cohérence de l'ensemble. Je dois avouer que j'ai fait quelques erreurs de coordination en chinant, car je ne connais pas tout. Mais je m'efforce d'apprendre au fur et à mesure. En discutant avec les vendeurs et en m'intéressant aux objets que j'achète, j'arrive à mieux situer leur époque et à éviter les mélanges inappropriés. Bien sûr, cela peut être compliqué pour ceux qui ne sont pas familiers avec ces époques, mais généralement, seuls ceux qui ont vécu ces années-là sont capables de détecter les incohérences. En ce qui concerne la question de ce qui rend une photo vintage, j'aime mêler l'actuel avec le vintage. Bien que pour une véritable photo vintage, il faudrait peut-être une qualité moindre, je tiens à maintenir un certain niveau de qualité. Le style vintage passe à travers différents éléments tels que le stylisme, le décor, la mise en beauté, la coiffure et bien sûr, le style de retouche. Pour moi, chaque détail compte. Je veux que chaque élément de la photo soit soigneusement pensé, rien ne doit être laissé au hasard. Même si parfois, le hasard peut bien faire les choses, j'aime que tout soit réfléchi et intentionnel.
Lorsque tu as commencé à pratiquer la photographie de style vintage, étais-ce davantage par passion ou avais-tu déjà l'intention d'en faire un business ?
C'était par passion. Jamais je n'aurais pensé me retrouver là où je suis aujourd'hui. Pas du tout. En fait, tout a toujours été une question de passion. Puis, quand j'ai commencé à voir que ça fonctionnait bien, c'est là que j'ai décidé de créer mon entreprise. Parce que je risquais de passer à côté de certains contrats si je ne pouvais pas facturer, etc. Donc, c'était un peu compliqué. J'ai pensé, je vais créer mon entreprise, ça ne me coûte rien. Si je ne gagne rien, je veux dire, je n'ai pas de taxes à payer. En tant qu'entrepreneur, si on gagne zéro, on paye zéro. Mais je me suis dit, je vais la créer à côté. On verra bien. Au début, je respectais les règles, et au moins, je pouvais accepter des contrats. Mais jamais, jamais, jamais, je n'aurais pensé en vivre. À l'époque, beaucoup me demandaient, tu ne penses pas en faire ton métier ? Et ma réponse était toujours, “jamais de la vie, je ne me vois pas faire ça tous les jours”. Mais c'est une belle leçon. Au final, il ne faut jamais dire jamais. Maintenant, je ne changerais mon métier pour rien au monde. Je suis tellement contente d'avoir pris le risque et de faire ce que je fais. Aujourd'hui, je ne me vois pas faire autre chose.
Comment as-tu pu mettre en avant ton art, tes photographies ? Est-ce à travers les réseaux sociaux ?
Oui, quasiment toute ma visibilité vient d'Instagram, depuis toujours. Il y a eu des hauts et des bas, mais j'ai toujours fait toute ma communication là-dessus. J'avoue avoir hésité un moment à aller sur TikTok mais j’ai l'impression de maîtriser beaucoup plus les codes d'Instagram que ceux de TikTok. Instagram me suffit amplement pour l'instant. Mais c'est compliqué d'être partout, de tout gérer toute seule. En tant que photographe, on est aussi community manager, on poste sur les réseaux, on a un peu plein de métiers différents, malheureusement, on ne peut pas être partout. Mais Instagram a toujours été ce qui a marché pour moi, c'est de là que quasiment 90% de mes clients viennent.
Ce qui a fait que ça marche aujourd'hui, c'est que j'ai mon style bien défini et qu’on le trouve difficilement ailleurs. En général, les gens viennent me commander un shooting pour mon style, pas parce que j'ai des prix qui peuvent être plus bas. Quand j'ai voulu en vivre, je me suis dit que je ne voulais pas baisser mes prix pour qu'on me choisisse pour ça, mais vraiment pour mon travail. C'est pour ça que j'ai pu me permettre de fixer des tarifs qui ne sont pas trop bas, qui me conviennent. Bien sûr, c'est un budget, tout le monde ne peut pas se permettre un shooting, mais il faut comprendre que c'est un investissement, un souvenir pour la vie. Derrière, il y a tout un travail. Ce que je voulais, c'était que les gens viennent en se disant : "J'investis, je suis investi dans son travail et dans ce qu'on va produire". C'était important pour moi d'avoir des clients sérieux et qui me ressemblent. Donc, ça a été une force pour moi que la différenciation se fasse par mon style. Tout est bien pensé, mais sans y avoir pensé. Quand on me dit "J'aime ton style, on ne le retrouve pas ailleurs", je me dis que c'est ma force, même si je n'en étais pas consciente au départ.
Est-ce que des marques / entreprises te contactent pour faire des campagnes / publicités ?
Je travaille principalement avec des particuliers. C'était un choix que j'ai fait, parce qu'au début, j'ai essayé les deux et j'avoue avoir eu une préférence. Avec des particuliers, c'est plus tranquille, c'est du travail, mais c'est plaisant parce qu'on apprend à les connaître, on échange des expériences, on est plus à l'écoute. Avec une marque, c'est souvent beaucoup d'exigences et de sérieux, parfois ma créativité peut être bridée. Pas toutes, mais en général, c'est comme ça. En revanche, je suis en train de développer des partenariats avec des entreprises comme Adobe, et ça, c'est cool. On fait régulièrement des partenariats sur Instagram, c'est génial, et en plus, ils sont super sympas. Récemment, je suis devenue ambassadrice pour eux, donc c'est vraiment une chouette opportunité. Ils me donnent carte blanche, ils me disent : « On aimerait promouvoir ça, fais la vidéo que tu veux. » C'est super en termes de liberté créative, je suis ouverte à plein d'idées et à chaque fois, ils me font confiance. J'aimerais développer plus de partenariats comme ça, avec des marques qui me ressemblent. Je ne suis pas contre de shooter avec d'autres marques, mais il faut que cela me ressemble. Par exemple, j'ai travaillé avec Guerrisol, une friperie à Paris, et ça me ressemblait bien parce qu'on est dans le même délire vintage, et j'avais vraiment aimé. Maintenant, si je dois travailler avec des marques, ce sont des marques qui me ressemblent et avec lesquelles le feeling passe bien. Pour moi, le feeling est super important. Je veux que tout le monde s'amuse, qu'on ait la même vision artistique, que tout le monde soit content. Je préfère signer un devis peut-être moins élevé mais avec un projet super, plutôt qu'un devis très élevé qui me prendrait la tête et me ferait passer des semaines d'angoisse. Aujourd'hui, ma santé mentale compte plus que l'argent.
Est-ce que parfois les clients font appel à toi pour ta démarche artistique ?
Ça dépend. Soit les gens ont une idée hyper précise d'un lieu et après, on le peaufine ensemble. Soit les gens viennent en mode « j'aime ton travail mais je ne sais pas du tout quoi faire ». Là, ce que je leur propose, c'est de se balader sur Internet, sur Pinterest, sur Instagram, d'enregistrer toutes les photos qu'ils aiment bien même si elles n'ont aucun lien les unes entre elles et qu'ils m'envoient tout. Je regarde un peu tout ce qu'ils m'envoient, voir ce qu'ils aiment, si c'est plus de l'extérieur, du studio, quelle année on est dans le vintage. Après, en fonction de ça, je leur propose des idées, je leur propose un spot, je leur propose un décor. On voit un peu tout ça et après, on peaufine ensemble. Ça dépend. Il y a des gens qui savent déjà ce qu'ils veulent et après, on a juste à peaufiner ensemble ou sinon pas du tout. Par exemple, en ce moment, c'est le printemps, il y a des champs, il y a des fleurs. Je propose ça pour des gens qui n'ont pas forcément trop d'idées ou sinon il y a aussi la foire. En ce moment, c'est sympa pour faire un style un peu années 80, 90. Ça peut être sympa. Des fois, il y a des petits spots comme ça qui apparaissent et ça, ce sont des propositions sur une courte durée ou alors soit on part sur un truc en intérieur ou en extérieur ou on démarche des lieux si c'est un truc vraiment précis.
Quels sont les matériels que tu utilises (appareils, objectifs, lumières ? Est-ce que tu as des marques de prédilection ou des appareils que tu affectionnes particulièrement et que tu utilises à chaque fois ?
J'ai toujours été chez Pentax. Malheureusement, je trouve que Pentax n'est plus hyper présent en termes de nouvelles technologies. J'aimerais bien, par la suite, travailler davantage avec une marque d'appareil photo. En termes d'innovation, il y a des trucs hyper sympas chez d'autres concurrents. Je vais commencer à tester un peu des appareils et voir ce qui pourrait mieux me correspondre. Mais sinon, j'ai toujours été très fidèle jusqu'à présent chez Pentax. En boîtier, j'ai un Pentax KP. Ça doit faire 3 ou 4 ans que je l'ai. Il est un peu en fin de vie. C'est pour ça qu'aussi, je pense qu'il y a moyen que je change prochainement. En objectif, je suis chez Sigma. J'ai mon 35 mm 1.4 que j'adore. Je l'ai depuis des années et je ne jure que par lui. Mais depuis quelques temps, j'ai aussi un 17-70 mm 2.8 de chez Pentax.
Quelle est la part de la post production dans ton travail ? Et quels sont les logiciels que tu utilises ?
La retouche représente environ 50% du temps que je consacre à un projet. Je passe énormément de temps sur cette étape. J'entame le processus sur Lightroom pour ajuster la lumière et les couleurs. Contrairement à certains, je n'utilise pas de presets. Je préfère travailler au feeling, ce qui peut surprendre certaines personnes, car mes photos ont une certaine cohérence. Cela s'explique par le fait que j'ai mes réglages en tête et que je trouve que les presets ne s'adaptent pas toujours correctement à chaque photo. Par conséquent, je préfère recommencer depuis le début pour chaque image. Après avoir affiné mes réglages, je les applique aux autres photos du même shooting, que j'ajuste ensuite individuellement. Ce processus demande du temps, mais je trouve qu'il en vaut la peine. J'ai essayé les presets, mais ils ne correspondent pas à ma vision artistique. Depuis un peu plus d'un an, je travaille également avec Photoshop. Sur la plupart de mes shootings, je retravaille le fond des images, en retirant parfois des éléments gênants. L'utilisation de l'intelligence artificielle de Photoshop ouvre de nouvelles possibilités passionnantes. Au début, j'ai eu du mal à maîtriser Photoshop en raison de sa complexité, mais je progresse rapidement grâce à la pratique. Désormais, je suis capable de transformer complètement les décors de mes photos. Par exemple, lors d'un récent shooting dans un champ de jonquilles, j'ai modifié le fond pour créer une ambiance printanière. Dans une autre séance, j'ai prévu de supprimer le fond d'une piste de ski intérieur pour le remplacer par une montagne en Belgique qui s'appelle Ice Mountain, afin de donner l'illusion d'être en extérieur. Je trouve passionnant de pouvoir expérimenter avec ces nouvelles technologies. Cependant, je suis également admirative des personnes capables de réaliser des transformations impressionnantes sans recourir uniquement à l'intelligence artificielle. Avec Adobe, nous partageons une vision artistique similaire, axée sur l'évolution et l'adaptation aux nouvelles technologies. Pour moi, l'essentiel est de capturer la personne telle qu'elle est à l'instant présent. Le décor peut être ajusté selon les préférences de chacun, mais l'essence de la personne doit être préservée.
Est-ce que tu aurais un conseil à donner à quelqu’un qui souhaite se lancer dans la photographie ?
"Trouve ton style", même si ce n'est pas le plus simple, c'est ce qui te permettra de te distinguer de toute la concurrence qui existe dans la photo. Essaie de te différencier, c'est ca, c'est la clé en fait de ce qui va marcher.
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